Palombe

j'ai une volière
où s'amusent et volent des millions d'oiseaux.
il y en a de toutes sortes
et la plupart se croisent sans se connaître
sans se regarder.

Parfois il y en a un qui meurt. Alors parmi les millions qui restent il y en a cent qui viennent le pleurer.
Certains soirs il y en a un qui chante plus rouge que les autres, alors parmi les millions qui restent il y en a mille qui battent des ailes pour le féliciter.
Il arrive qu'un pigeon voyageur fasse des acrobaties inouïes au petit matin. Alors parmi les millions d'autres oiseaux il peut s'en trouver dix-mille qui cherchent à l'imiter.
Dans ma volière il y a une palombe insaisissable, que des millions admirent, qui chante avec une pureté telle que des nuées de ramiers accourent de l'Est, dont l'élegance du vol attire des milliers de prétendants, et qui repousse les ténèbres et la peur de la mort avec une telle assurance que des nids de tourtereaux se pressent sous ses plumes.
Parmi ces milliers, ces nuées, ces centaines, de tous ces millions, il est un vieux hibou, qui surveille l'ensemble. L'oiseau qui le plus désire que la palombe soit belle, soit grande, soit libre. Jour et nuit
nuit et nuit
de ses grands yeux il veille
et pendant les vols de l'admirable balaie le sol de sa boîte,
et lui apporte non des souris mais des graines choisies, excellentes pour le teint, la voix, la vue.
De tous les millions d'oiseaux, le hibou est celui qui voudrait mourir pour la liberté de la palombe.
Un jour la palombe lui dit: je voudrais être libre, et tout m'y pousse. Seuls tes grands yeux de hibou m'empêchent de prendre l'envol.
Alors le hibou s'approche de moi, contre la grille de la volière, et me dit: fais-moi sortir, que je me vomisse moi-même et fais de mes plumes un tapis pour brigands.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Cercle vicieux

Incarnation

Ancrage